Les oubliés de l’aide humanitaire

Camille Dave, 70, standing next to the shack she lives in since her house collapsed on January 12. In Sibert, a rural area located on the outskirts of Port-au-Prince, up to 70% of houses are inhabitable. Credits: CARITAS/MathildeMagnier

Camille Dave, 70, standing next to the shack she lives in since her house collapsed on January 12. In Sibert, a rural area located on the outskirts of Port-au-Prince, up to 70% of houses are inhabitable.
Credits: CARITAS/MathildeMagnier

Par Mathilde Magnier

A Port-au-Prince, bon nombre de quartiers classés non-prioritaires mais néanmoins fortement affectés par le séisme n’ont jamais été touché par l’aide humanitaire. Caritas s’engage auprès de ces communautés.

A première vue, Sibert semble avoir bien résisté au séisme du 12 janvier. Dans ce quartier presque rural, situé à la périphérie Nord de Port-au-Prince, peu de dégâts apparents. La plupart des maisons de briques et de bois sont encore debout, les étals de fruits et légumes se sont réinstallés le long de la route principale. Même les chèvres et les porcs ont réintégré leur place. Pourtant, quatre mois après le séisme, le quotidien pèse plus lourd que jamais sur la population. Ni totalement effondré, ni épargné pour autant, Sibert fait partie des nombreux quartiers de la capitale où la destruction n’a pas été assez massive pour que l’aide décide de s’y arrêter. La population y vit aujourd’hui dans une précarité critique. Un problème récurrent dans la capitale, où l’activité des humanitaires se concentre dans les zones les plus affectées au détriment de celles classées non-prioritaires. Depuis quelques mois, seule Caritas s’est engagée auprès de habitants de Sibert.

Car en dépit des apparences, plus de 70% des habitations du quartier sont aujourd’hui impraticables. Plus de 20% des abris ont été totalement détruits et près de 50% sont trop endommagés, « trop fêlés » pour être utilisables, comme l’explique Wisnet Garein. « La maison n’est plus habitable, les cracs et les fentes dans les murs sont beaucoup trop importants, c’est dangereux, alors nous vivons dehors, dans la tente que nous a donné Caritas », explique le jeune chef de famille, les traits fatigués et l’air visiblement préoccupé. « Depuis le séisme, je n’ai plus de travail. Je ne sais plus comment m’occuper de mes enfants » reprend-t-il, les yeux posés sur ses deux petits âgés de 3 et 5 ans.

Avant le séisme, Sibert, zone intermédiaire située à mi-chemin entre la ville et la campagne, souffrait déjà de sa localisation. Situation que les évènements du 12 janvier n’ont fait qu’empirer. « Ici, l’isolement et l’éloignement du quartier par rapport au centre de Port-au-Prince est un vrai handicap. Pas de pôle ou d’activité économique à proximité qui puisse employer la population. Dans le même temps, impossible de pouvoir vraiment profiter des avantages dont disposent les communautés rurales, notamment en terme d’espace et d’accès à la terre » souligne Irina Klimkova, en charge du projet Caritas. Si une petite minorité, comme Wisnet, était employé dans une entreprise de Port-au-Prince, la plupart vivaient des maigres récoltes de leurs petits « jardins » comme on les appelle en Haïti. Aujourd’hui, tout cela n’existe plus. Le fabriquant de boissons dans laquelle travaillait Wisnet a disparu, et les produits de la terre dont vivaient les autres suffisent à peine à nourrir leurs familles. Sans parler des bouches à nourrir qui sont venues se rajouter au cours des dernières semaines.

« Avant, nous vendions un peu de pois, de maïs et de manioc. Mais nous avons quatre grands enfants, il faut qu’ils mangent ! Aujourd’hui, nous ne pouvons plus vendre nos réserves. Et en même temps, nous avons besoin d’argent ! », se lamente Marelise Thomas, visiblement dépassée par les évènements. A la différence de Wisnet, la maison de Marelise a été complètement détruite par le séisme. Jusqu’au jour où les équipes de Caritas lui a remis une tente, elle, son mari et leurs quatre filles vivaient dans la hutte de terre et de branchages qui servait jusqu’alors d’abri aux 3 poules et à la petite chèvre de la maison.

« Dans un quartier comme celui-ci, il faut procéder par étape. D’abord, nous procurons un abri aux familles, nous nettoyons les décombres de leurs maisons. Puis nous aidons l’école à se remettre en route, notamment grâce aux tentes et aux kits scolaires que nous distribuons, et petit à petit, nous travaillons avec la communauté pour lui redonner les moyens de son autonomie », souligne encore Irina Klimkovà. « Pour cela, il faut rééduquer et former les gens autour des activités déjà existantes, agriculture et petits commerces notamment, qui demandent seulement à être valorisées. Mais surtout, il faut les impliquer dans cette démarche », ajoute la jeune Tchèque en observant les équipes de cash for work, tous originaires de Sibert, qui s’affairent autour des débris de la maison de Marelise. « Nous sommes les seuls à pouvoir être maîtres de nos destins », glisse l’un d’eux en se baissant pour déplacer un morceau de parpaing.

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