Intégrer les populations de déplacés dans les provinces, une priorité en Haïti

Fisherman's house in Petite Rivière, a rurale community in the province of Nippes, South of Haïti. Over 30% of the population are fisherman in Nippes when the remaining 70% are farmers. Credits: CARITAS/MathildeMagnier

Fisherman’s house in Petite Rivière, a rurale community in the province of Nippes, South of Haïti. Over 30% of the population are fisherman in Nippes when the remaining 70% are farmers.
Credits: CARITAS/MathildeMagnier

Par Mathilde Magnier

Depuis le tremblement de terre du 12 janvier, près de 600 000 personnes ont fuit la capitale en ruine pour trouver refuge dans les provinces. Plus de 4 mois après le séisme, le département de Nippes travaille avec le soutien de Caritas à l’intégration de ces populations déplacées.

« A la maison, cela fait plus de 3 mois que nous sommes 16 à table tous les jours », lance Sébien Danbrevil. « On arrive tant bien que mal à faire face à la situation mais ce n’est pas toujours simple. En même temps, pas question de renvoyer qui que ce soit à Port-au-Prince. Ils ont tout perdu là-bas, qu’est ce qu’ils iraient faire dans cette ville en ruine ? », explique encore le vieil agriculteur avec un sourire fatigué.

Comme beaucoup de personnes à Fond des Nègres, petite commune de Nippes, au sud d’Haïti, Sébien a vu l’effectif familial doubler depuis le tremblement de terre. Au cours des derniers mois, plus de 33 000 personnes sont venues se réfugier dans cette région rurale et maritime. Ce qui n’est pas sans poser problèmes aux petites localités de ce département, lourdement frappé par le séisme. A Nippes, le tremblement de terre aura fait plus de 44 000 victimes et rendu près de 20% des maisons inhabitables. Un coup dur pour cette région agricole reculée, où la population, essentiellement composée de petits cultivateurs et de pêcheurs, vivait dans une grande précarité avant même le 12 janvier.

« Les distributions de nourriture, de bâches, de tentes, l’activité des cliniques mobiles mais aussi les infrastructures de la zone, déjà très fragiles… tout a été impacté par la présence des déplacés, ce qui n’est pas simple à gérer au quotidien ! », explique Roncarly Fleurestil, ingénieur Caritas à Nippes.

La priorité aujourd’hui : « faire redémarrer la machine », aider les habitants à faire face à cet afflux de population en procurant des activités rémunérées aux victimes du séisme via les programmes de Cash for Work et les projets de réhabilitation, également générateurs de revenus. Une initiative essentielle dans la région. « Grâce à notre salaire de Cash for Work, 2000 gourdes par semaines, nous avons pu acheter la nourriture nécessaire pour nourrir les bouches supplémentaires, payer l’école des enfants, les soins médicaux ou encore toutes les dettes contractées depuis le séisme », explique Amecia Merilas. Chef d’une des quatre équipes de Cash for Work de Fond des Nègres, lui et ses hommes sont en charge du nettoyage des déchets et ordures ainsi que de l’assainissement de la zone, dont l’insalubrité, grandissante depuis l’arrivée des sinistrés, inquiète.

Comme Sébien, Amecia est cultivateur et accueille aujourd’hui une demi-douzaine de personnes dans la petite maison familiale où il vit avec sa femme et ses six enfants. Mais en dépit de ses efforts, ses récoltes de maïs, sorgo, haricot ou manioc ne suffisent pas à nourrir tout le monde. D’autant qu’avec les pluies diluviennes qui s’abattent presque quotidiennement sur la région, il lui est plus en plus difficile d’emprunter les routes défoncées et inondées pour aller vendre sa petite production.

Si la plupart des compagnons Cash for Work de Sébien et Amicia sont des voisins, des gens de Nippes, bon nombre sont des réfugiés, originaires de Port-au-Prince. Ce qui n’est pas sans créer quelques tensions. « Tout le monde a besoin de travailler ici. Aider les déplacés, évidemment, mais les gens de chez nous d’abord », estime Amecia.

Car la question de l’emploi est un vrai problème à Nippes. « Ici, 80% de la population se débat pour trouver quelque chose à faire », observe Pierre Yves Jean Charles, coordinateur de la Caritas Nippes. « Alors si nous voulons faire en sorte que les déplacés restent dans la région, il est indispensable de créer des emplois, de mettre en place des programmes de micro-crédits, qui puissent aider les réfugiés à se recapitaliser et se fixer dans les lieux ruraux », continue Pierre Yves Jean Charles. « Nippes est une région extrêmement fertile, il y a un potentiel agricole fabuleux ici. Mais tout cela est encore largement inexploité. Les petits cultivateurs et pêcheurs de la région procèdent encore de façon très archaïque. Tous ont besoin de soutien technique, matériel, financier. Il faut revaloriser la zone, la transformer en un pôle attractif. Pour avancer, Haïti doit se décentraliser. C’est la seule solution », conclut Roncarly Fleurestil.

 

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